Introduction au Démembrement de Propriété

Le démembrement de propriété est un concept juridique qui permet de diviser un bien en deux droits distincts : l’usufruit et la nue-propriété. L’usufruitier a le droit de jouir du bien et d’en percevoir les revenus (comme les loyers) pendant une période déterminée, tandis que le nu-propriétaire détient le titre de propriété sans en avoir la jouissance immédiate. À l’extinction de l’usufruit (souvent au décès de l’usufruitier), le nu-propriétaire récupère la pleine propriété du bien.

Le démembrement de propriété peut découler d’une intention délibérée lors d’une donation ou d’une situation involontaire dans le cadre d’une succession après un décès. Il peut concerner des biens immobiliers, des placements financiers ou des comptes-titres.

L’usufruitier ou le nu-propriétaire peuvent souhaiter vendre le bien démembré. La question qui se pose alors est de savoir comment utiliser le prix de vente. Comme nous le verrons dans cet article, plusieurs options sont possibles. Chacun devra choisir la solution qui correspond le mieux à ses besoins spécifiques. Il est cependant important de rappeler que la vente ne peut se faire qu’avec l’accord conjoint de l’usufruitier et du nu-propriétaire.

 

Première Solution : Le Partage du Prix

La solution la plus simple et directe consiste à partager le prix de vente entre l’usufruitier et le nu-propriétaire. La répartition se fait en fonction des valeurs respectives de l’usufruit et de la nue-propriété, calculées selon des barèmes fiscaux prenant en compte l’âge de l’usufruitier au jour de la vente.

Exemple :

  • Valeur totale du bien : 200 000 €
  • Si l’usufruitier a 72 ans : Usufruit = 30% (60 000 €), Nue-propriété = 70% (140 000 €)

Cette solution permet à chaque partie de disposer immédiatement de sa part du prix de vente, facilitant ainsi les réinvestissements ou dépenses selon les besoins individuels.

 

Deuxième Solution : Le Remploi des Fonds sur un Nouvel Actif

Si l’usufruitier et le nu-propriétaire sont d’accord, il est possible de remployer le prix de vente dans un nouveau bien immobilier et de reporter le démembrement de propriété sur ce nouveau bien.

Cette option nécessite quelques précautions juridiques et administratives : il faudra convenir du sort du prix de vente dans l’acte de vente initial et déclarer le remploi du prix dans l’acte d’acquisition du nouveau bien pour reporter le démembrement.

A l’inverse du partage du prix, cette solution permet de maintenir les avantages fiscaux et juridiques du démembrement tout en réinvestissant les fonds dans un autre bien.

 

Troisième Solution : La Remise du Prix de Vente à l’Usufruitier, le Quasi-Usufruit

Une autre solution consiste à remettre l’intégralité du prix de vente à l’usufruitier, qui disposera alors de ce que l’on appelle un « quasi-usufruit ».

À l’issue de la vente, seul l’usufruitier recevra l’argent et pourra en disposer librement, sans avoir de comptes à rendre aux nus-propriétaires. Ces derniers auront une créance sur le patrimoine de l’usufruitier. Ils pourront exiger le remboursement de cette créance au décès de l’usufruitier, mais pas avant.

Pour sécuriser cette créance, les parties devront établir une convention de quasi-usufruit. Cette convention permettra de fixer le montant de la créance, son éventuelle indexation, les garanties exigées par les nus-propriétaires, et les éventuelles restrictions à l’utilisation des fonds par l’usufruitier.

À la mort de l’usufruitier, la créance de restitution du nu-propriétaire devient exigible et constitue un passif de succession déductible, réduisant ainsi l’assiette des droits de succession.

 

Conclusion

La vente d’un bien immobilier démembré offre plusieurs solutions pour l’utilisation des fonds obtenus. Chaque option présente des avantages et des inconvénients qu’il convient de peser attentivement. Que vous choisissiez le partage du prix, le remploi des fonds dans un nouveau bien, la remise du prix de vente à l’usufruitier ou un mix des différentes solutions, il est essentiel de consulter un professionnel (notaire, expert-comptable) pour sécuriser juridiquement et fiscalement l’opération.