Vous venez d’investir dans un logement locatif meublé ? Vous pensez pouvoir louer votre bien comme bon vous semble ? Attention si vous souhaitez faire de la location meublée saisonnière, votre copropriété peut interdire ce type d’activité.
Face à l’essor important de la location saisonnière, notamment par le biais des plateformes en ligne, la règlementation s’est durcie et complexifiée : limite de 120 jours pour la résidence principale, déclaration obligatoire en mairie, changement d’usage selon les communes, règle de compensation dans les villes de plus de 200 000 habitants…
Il existe cependant une contrainte que les loueurs oublient régulièrement ! La location courte durée peut en effet nuire à la tranquillité des immeubles et provoquer des troubles de voisinage. Les copropriétaires peuvent également s’opposer à votre activité. Il convient donc de prendre toutes les précautions nécessaires en amont et de bien lire votre règlement de copropriété. Plus d’explication dans cet article.
Quelques rappels
La loi du 10 juillet 1965 rappelle que : « Le règlement de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l’immeuble, telle qu’elle est définie aux actes, par ses caractères ou sa situation ».
Vous êtes donc en principe libre d’utiliser votre bien et de jouir des parties privatives tant que vous ne portez pas atteinte aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l’immeuble.
Qu’est-ce que la destination de l’immeuble ?
La destination de l’immeuble correspond à l’usage de ce dernier. Il existe différentes clauses d’habitation :
La clause d’habitation bourgeoise exclusive
Cette clause réserve l’immeuble en son entier à de l’habitation. Les activités commerciales, artisanales et libérales sont strictement interdites.
La clause d’habitation bourgeoise simple
Cette clause permet, en plus de l’habitation, l’exercice d’activités libérales et professionnelles à condition qu’elles ne génèrent pas de nuisances sonores. Cette définition assez vaste a permis une certaine tolérance, même si les activités commerciales et artisanales y sont en principe interdites.
Les récents arrêts confortent d’ailleurs définitivement l’orientation de la jurisprudence vers une appréciation assez stricte de la conformité des locations avec les clauses du règlement de copropriété. Un arrêt de la Cour de Cassation du 27 février 2020 précise que « lorsque la destination de l’immeuble est l’usage exclusif d’habitation, un copropriétaire ne peut être autorisé à exercer une activité commerciale même si le règlement de copropriété précise que l’utilisation des locaux à titre professionnel était autorisée ».
La clause à destination mixte
Cette clause permet l’exercice d’activités commerciales sous réserve de respecter l’affectation des lots.
Pourquoi la location saisonnière serait interdite dans une copropriété ?
La location meublée courte ou longue durée est une activité qui, fiscalement, est rattachée aux revenus commerciaux (BIC).
De plus, l’article L 637-1 du Code de la Construction et de l’Habitation précise que “Le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile constitue un changement d’usage au sens du présent article ».
Ainsi, dans le cadre de la règlementation de l’urbanisme, les logements dédiés à la location saisonnière passent d’un usage d’habitation à un usage commercial. Ce changement d’usage est obligatoire pour les communes de plus de 200 000 habitants ou pour celles l’ayant imposé par délibération (+ d’infos).
En s’appuyant sur ces aspects, le syndic peut ainsi interdire toute activité de location saisonnière si le règlement de copropriété exclut toute activité commerciale.
On peut néanmoins penser que le seul type de location meublée qui peut être véritablement proscrit dans un règlement de copropriété est la location saisonnière. La location en meublé d’un logement constituant la résidence principale du locataire ne semble en effet pas devoir causer plus de troubles de voisinage qu’une location nue.
Que peut faire le syndic ?
Dans ce contexte, il est donc recommandé, avant de proposer son bien à la location sur une plateforme de location saisonnière, de vérifier l’usage possible des locaux auprès de la copropriété, en étudiant le règlement de copropriété et plus précisément la partie dédiée à la destination de l’immeuble et/ou ses conditions de jouissance.
A défaut d’observer ce règlement, le syndic pourra vous rappeler à l’ordre par recommandé, et engager, le cas échéant, une action en justice afin de vous obliger à cesser immédiatement cette activité, voire demander des dommages et intérêts s’il démontre un préjudice comme une dégradation des parties communes.
Est-ce possible de modifier le règlement de copropriété ?
Si vous avez investi dans un logement que vous souhaitez louer en courte durée et que le règlement ne le permet pas, vous pouvez toujours faire une demande pour le modifier.
Il faudra adresser cette demande au syndic de copropriété qui inscrira son examen à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale des copropriétaires. Pour être modifié, le règlement devra faire l’objet d’un vote lors de cette assemblée générale et, dans le cas d’un changement d’usage, la décision devra être validée à l’unanimité.
En conclusion
Le règlement de copropriété peut permettre aux copropriétaires d’interdire la location en meublé, en particulier la location courte durée. Si dans un immeuble prévu pour une occupation mixte, on ne peut en principe pas interdire la location meublée en raison de la destination de l’immeuble (logements et commerces), dans le cas d’un règlement de copropriété prévoyant une occupation « bourgeoise », la location meublée ne sera en principe pas possible.
Dans ce contexte, il est prudent de vérifier l’usage des locaux auprès de la copropriété avant toute mise en location.
Si les jurisprudences ont parfois eu des directions différentes – à titre d’exemple, la Cour de cassation a accepté la location meublée de courte durée dans un immeuble où le règlement de copropriété acceptait les professionnels libéraux, et a en revanche refusé la location para-hôtelière dans un immeuble résidentiel – les jugements plus récents semblent aller vers une application plus stricte des règlements de copropriétés.
Enfin, si l’activité de location de courte durée est toutefois autorisée, vous devez malgré tout veiller à la tranquillité de l’immeuble et aux droits des autres copropriétaires.