La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2021 prévoit un alignement des règles sociales et fiscales pour les loueurs en meublés professionnels. 

Depuis le 1er janvier 2020, les loueurs en meublés sont qualifiés de professionnels si les revenus annuels issus de la location meublée sont supérieurs à 23 000 € et dépassent les autres revenus d’activité du foyer fiscal.

En entérinant la décision du Conseil constitutionnel, la loi de finances pour 2020 a en effet supprimé le critère d’inscription au registre du commerce et des sociétés (RCS) pour être qualifié de loueur en meublé professionnel.

Un an après la modification du texte fiscal, c’est le texte social qui est également ajusté.

Loi de financement de la Sécurité sociale pour 2021

Depuis le 1er janvier 2021, les loueurs en meublés professionnels (LMP) sont obligatoirement assujettis aux cotisations sociales des indépendants.

La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2021 modifie l’article L. 611-1 et supprime à son tour la condition d’inscription au RCS comme critère d’affiliation. Ainsi, le code de la Sécurité sociale sera en parfaite cohérence avec le code général des impôts. Les loueurs en meublés professionnels (re)deviennent donc redevables des cotisations sociales de la Sécurité sociale des indépendants (SSI).

Le texte ne fait mention d’aucune rétroactivité. Dans l’attente d’un décret précisant les contours de cette mesure, cette dernière doit normalement s’appliquer à partir du 1er janvier 2021.

Le critère d’affiliation pour les LMNP de locations saisonnières, réalisant plus de 23 000 € de recettes, reste inchangé.

Quels impacts pour les loueurs en meublé devenant professionnels ?

Ce changement clarifie l’imposition des loueurs en meublés professionnels. En effet, si les LMNP (loueurs en meublés non professionnels) sont assujettis à la CSG à hauteur de 17,2 %, les LMP sont désormais imposés aux cotisations sociales SSI (environ 32 %).

Si cette différence peut inquiéter à première vue, l’imposition des loueurs ne va cependant pas doubler. Qu’il s’agisse de l’imposition du résultat ou des plus-values, les bases imposables et modes de calcul sont différents et méritent de plus amples explications.

Rappelons également que le régime de la location meublée, qu’il soit exercé sous le régime non professionnel ou professionnel, reste moins fiscalisé que le régime foncier ou celui de la Société civile immobilière (SCI), soumise à l’impôt sur les sociétés (IS). 

Imposition du résultat fiscal

Pour l’imposition du résultat fiscal, les conséquences restent limitées pour les LMP lorsque le résultat fiscal issu de l’activité de location meublée reste faible ou à 0 €. C’est le cas pour la majorité des loueurs en meublés, compte tenu des charges et de l’amortissement du bien.

Ainsi, si l’activité n’est pas bénéficiaire, ils devront s’acquitter du forfait minimum d’un montant de 1 145 €. Si le résultat est positif, il sera soumis aux cotisations sociales SSI (environ 32 % à 24 % du résultat brut). Ces cotisations sont majoritairement déductibles de l’assiette fiscale ainsi que de leur propre assiette pour le calcul de l’impôt sur le revenu (IR).

Pour illustrer ce que l’affiliation à l’Urssaf va coûter, prenons deux exemples :

  • Monsieur Durand, LMP en 2021, avec un résultat fiscal de 0 €. En 2020, Monsieur Durand ne payait ni impôt ni prélèvements sociaux. En 2021, il devra s’acquitter du forfait minimum de 1 145 € auprès de l’Urssaf. Il ne payera toujours pas d’IR.
  • Madame Dupond, LMP en 2021, tranche marginale de 30 %, avec un résultat fiscal de 8 000 €. En 2020, Madame Dupond payait 3 776 € d’impôts (8 000 x 47,2 % ; 47,2% = impôt 30 % + CSG 17,2 %). En 2021, elle devra s’acquitter de 4 192 € de prélèvements obligatoires, répartis comme suit : cotisations sociales d’environ 2 560 € (8 000 x 32 %) et 1 632 € d’IR. Les cotisations sociales étant déductibles de l’assiette fiscale, l’IR sera calculé ainsi (8 000–2 560) x 30 % = 1 632 €.

L’impact de l’affiliation au SSI sera différent en fonction de la tranche marginale sur laquelle vous êtes imposé. De même, les investisseurs déjà en statut de travailleur non salarié (TNS), au titre de leur activité principale, payent les cotisations SSI et ne seront donc pas assujettis à la base minimale si leur résultat est à zéro.

Imposition des plus-values

Lors d’une vente, pour les LMNP, la plus-value taxée dans le régime des particuliers correspond à la différence entre le prix de cession et le prix d’acquisition. Elle est imposée à 19 % au titre de l’IR et à 17,2 % au titre des prélèvements sociaux. Ce régime prévoit un abattement lié à la durée de détention du bien et permet d’être exonéré d’IR au-delà de vingt-deux ans de détention du bien cédé et de prélèvements sociaux après trente ans.

Pour les LMP, la plus-value taxée dans le régime des professionnels est égale à la différence entre le prix de vente du bien et sa valeur nette comptable. La part de la plus-value relative aux amortissements déjà pratiqués sera dite à court terme ou à long terme, si le bien a été inscrit au bilan au moins deux ans.

Les plus-values à court terme sont taxées à l’IR au barème progressif et sont assujetties  aux cotisations sociales SSI. Les plus-values à long terme sont taxées globalement au taux de 30 % (impôt à 12,8 % + CSG/CRDS à 17,2 %).

Quelles exonérations ?

Le régime LMP bénéficie aussi d’exonérations. Les plus-values à court terme de cession des LMP sont exonérées d’impôt pour les LMP qui réalisent moins de 90 000 € de recettes annuelles moyennes, au titre des deux derniers exercices précédents celui de la cession. Cette exonération est partielle jusqu’à un montant de recettes annuelles moyennes de 126 000 €. L’activité doit avoir été exercée depuis au moins cinq ans en LMP. Cette exonération n’est pas applicable aux cotisations sociales appelées sur les plus-values à court terme.

Les plus-values à long terme des cessions d’immeubles des LMP sont exonérées partiellement d’impôt et de CSG/CRDS au-delà de cinq ans d’inscription du bien à l’actif en LMP et totalement au-delà de quinze ans d’inscription.

Reprenons notre exemple : Monsieur Durand a acheté son appartement 600 000 €. Il le vend après six ans. Le prix de vente est de 750 000 €. La valeur nette comptable est de 480 000 €.

  • Si Monsieur Durand est LMNP, il sera taxé au taux de 19 % et 17,2 % sur la base de 150 000 € (750 000 – 600 000). Il bénéficiera d’une exonération de 6 % pour la plus-value taxable sur l’IR et de 1,65 % d’exonération pour les prélèvements sociaux pour six ans de détention.
  • Si Monsieur Durand est LMP, il sera taxé sur la base de 270 000 € (750 000 – 480 000) correspondant à 120 000 € de plus-values à court terme et de 150 000 € de plus-values à long terme. S’il réalise moins de 90 000 € de chiffre d’affaires et qu’il vend son bien au-delà de cinq années d’activité LMP, il sera complètement exonéré des plus-values à long terme et ne payera que les cotisations sociales sur les plus-values à court terme, soit environ 25 % sur 120 000 € = approximativement 30 000 €.

Ainsi, quand c’est possible, l’investisseur doit choisir le bon moment pour vendre et avec le bon régime fiscal, afin de ne pas majorer la taxation de ses plus-values. Attendre cinq ans d’activité en LMP pour bénéficier des exonérations de l’article 151 septies sera un choix fondamental pour les loueurs qui deviendront professionnels. À l’inverse, repasser en LMNP avant cession ou l’année de la cession est une solution envisageable dans certains cas.

Il conviendra aussi d’être particulièrement vigilant sur les apports depuis le patrimoine privé et les reprises en patrimoine privé. En effet, en régime LMP, les sorties de biens du bilan sans vente sont taxées dans le régime des plus-values professionnelles. C’est le cas des sorties du bilan pour retrait en patrimoine personnel, donation/succession. Or, dans ce cas, une taxation peut apparaître sans pour autant qu’il y ait de trésorerie disponible, l’immeuble n’étant pas vendu.

Des incertitudes demeurent.

Un décret à venir devrait préciser le traitement des particularités suivantes.

Cas des loueurs en meublé qui alternent le statut LMNP et LMP

La qualification fiscale du loueur en meublé (LMP ou LMNP) ne s’apprécie qu’à l’issue de l’exercice,  dans la mesure où elle dépend de revenus qui ne sont précisément connus qu’au 31 décembre. Les loueurs en meublés peuvent basculer automatiquement d’un statut à l’autre sans le vouloir et avec les conséquences fiscales induites.

Qu’en sera-t-il alors des LMP qui seraient assujettis aux charges sociales, s’ils redeviennent LMNP ? Faudra-t-il les radier rétroactivement ? Resteront-ils assujettis au risque d’avoir un traitement différent des autres LMNP ?

Cas particulier des loueurs en meublé non-résidents

Les non-résidents qui retirent plus de 23 000 € de recettes annuelles de leur activité de location meublée vont devenir automatiquement LMP s’ils n’ont pas d’autres revenus imposables en France.

Cependant, pour les non-résidents européens, cette affiliation rentre en conflit avec l’application du droit européen en matière de régime social. Celui-ci prévoit que chaque contribuable soit soumis aux cotisations d’un seul régime de Sécurité sociale (celui du pays de résidence et de l’activité principale).

De même, depuis le 1er janvier 2019, les non-résidents relevant du régime de Sécurité sociale d’un autre État de l’Espace économique européen (EEE) sont exonérés de la CSG et restent uniquement redevables du prélèvement de solidarité de 7,5 %.

Le décret devra donc préciser si les revenus des non-résidents seront effectivement soumis aux cotisations sociales ou à défaut aux prélèvements sociaux.

Cas particulier des loueurs en meublé en résidence gérée

De même, les loueurs en meublé qui investissent dans des résidences gérées pourraient vouloir contester le caractère professionnel de leur activité. En effet, ils sont liés à un gestionnaire par un bail commercial et n’ont nullement une participation active et continue dans l’activité de location meublée qui justifierait un caractère professionnel.

Bien entendu, ce type de démarche ne pourrait éventuellement aboutir qu’à l’issue de procédures juridiques longues et complexes.

En conclusion

Si l’affiliation à la SSI pour les loueurs en meublés professionnels peut inquiéter, celle-ci n’aura que peu d’impact immédiat sur l’imposition du résultat de l’activité des loueurs, car nombreux sont ceux qui ont un résultat fiscal à 0 ou faible.

En revanche, l’assujettissement aux cotisations sociales SSI pour les LMP aura de plus lourdes conséquences sur leurs plus-values à la revente ou en cas de cessation d’activité. Il conviendra donc de prendre conseil avant d’envisager toute vente ou retour d’immeuble dans le patrimoine personnel, ceci afin d’adopter la stratégie la plus adéquate.

Si la location meublée tant en LMNP qu’en LMP reste fiscalement plus intéressante que le régime foncier ou la SCI, passer par une SCI à l’IS pour exploiter une partie des meublés pourra cependant être une solution. Dans la mesure où le chiffre d’affaires de la SCI à l’IS n’entre pas dans le calcul qui détermine le caractère LMNP ou LMP, cela permettra de diminuer les recettes de location meublées afin de respecter les plafonds d’exonération des plus-values professionnelles ou de rester LMNP.   

Enfin, le décret à venir devrait préciser certains points, notamment concernant les expatriés, ou les modalités déclaratives et de paiement de ces cotisations sociales.

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